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Être soi-même semblerait presque à la mode. N’est-il pas question que de ça, en ces temps individualistes? Le fait est, pourtant, que celles et ceux qui font preuve, ne serait-ce que d’un soupçon de singularité sont extraordinairement rares.

Car devenir soi ne saurait être assimilé à une simple démonstration d’égotisme, ou à une accumulation de parures, de biens ou de succès.

Accéder à soi est une longue route semée d’embuches, un processus autant sinueux qu’inconfortable. Accepter de muer, se défaire de ses propres entraves et s’approcher de son essence, n’est sans doute pas donné à tous. Encore faut t’il avoir la force de renoncer à ce que l’on croit être. Parfois renier celles ou ceux que l’on aime. Être soi, c’est accepter de tuer l’ancien pour renaitre plus libre, mieux relié à son être profond. C’est accueillir le changement comme une promesse de mieux. Se montrer téméraire, en se jouant du danger.

Il faut avoir la foi en ses propres ressources, très au-delà des illusions, dites, réalistes. Et puis apprendre à se méfier de sa peur. Peur du jugement d’autrui, de l’isolement, peur de l’échec et de la mort. Comprendre que la vie n’est qu'un jeu grandiose, dont les règles sont enfouies quelque part, en chacun de nous. Ce jeu peut réellement être exaltant, dès lors que l’on comprend qu’il n’y a rien à perdre.

HR


Paris, 2021

Le matériel ! Cette foutue obsession du matériel ! Combien de fois la question suivante m’a-t-elle été posée ? Qu’utilises-tu comme appareils photos ? Ce à quoi je m’empressais de répondre : Quelle importance ?

C’est que je suis, en la matière, minimaliste convaincu, un anticonformiste qui se targue d’avoir traversé 20 ans d’une carrière tout à fait respectable, avec le matériel le plus insignifiant qui soit.

Ça n’est pas que les marques prestigieuses, et leurs optiques ultra nettes, ne m’aient jamais tenté. Il fut même un temps où j’en rêvais debout. C’est plutôt que, n’ayant eu, ni les moyens de mes ambitions, ni la patience de me lancer dans des recherches comparatives, je faisais avec ce que j’avais : deux vieux NIKON quasi indestructibles des années 80, et un CONTAX G2 bradé par une amie qui le trouvait trop lourd.

Avec ces uniques boitiers argentiques 135mm, j’ai sillonné le monde, léger comme une plume, photographié des personnalités parmi les plus sophistiquées. Jusqu’à ce qu’ils deviennent les prolongements de mon regard. Qu’ils fassent, littéralement, partie de mon corps, et que je ne puisse plus m’en défaire. Toute tentative d’essayer autre chose s’apparentait à un égarement. J’en perdais mes moyens. Ce qui m’a mené à interroger le sens profond de mon attachement. Il s’agissait d’un parti pris philosophique, une volonté farouche de résister au fétichisme technologique qui sévissait autour de moi. À cette manie, typiquement masculine, de vouloir comparer ses outils à ceux des autres. Plutôt qu’à leur technicité, je ne me suis jamais soucié que du contenu de mes images, n’ai consacré mon énergie qu’à pourchasser l’atemporel. J’ambitionnais de durer, et cultivais un style visuel du genre vintage, que je voulais même un peu plat.

Alors advint le numérique. Mais ça, c’est une autre affaire…

HR



Paris, 2015

En tant que migrant franco-haïtien, je ne comprends que trop l’impératif de concilier les paradoxes et de rester ouvert à toutes les gammes du vivant.

Mes deux cerveaux, le mental et le viscéral, abritent et superposent deux influences culturelles antagonistes jusque dans leurs fondements.

C’est autant une richesse qu'un fardeau, qui mènent à se réinventer en permanence. Tout se mélange en moi, et ne peut s’harmoniser qu’au sein d'une vision hybride dont la vraie cohérence est à chercher, justement, dans l’amplitude des dissemblances.

Dans les cas comme le mien, de plus en plus nombreux, la forme poétique et le collage s’imposent comme les façons les plus appropriées d’aborder le réel.

La linéarité est compromise et les codes conventionnels font figures de prisons.

Mon œuvre se déploie selon une dynamique, à la fois organique et expérimentale.

Ce qui n’est pas sans rappeler, notamment, le Tout-monde de Édouard Glissant.

HR


Paris, 2010

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