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Je peux dire de Fanny qu’elle fut ma muse.

La première fois que je l’ai vue, aux alentours de la Mosquée de Paris, je crois bien qu'elle n’avait pas 16 ans. Je n’ai pu m’empêcher de l’aborder pour lui demander si elle voulait poser pour moi. C’était à la fin des années 90.

Je n’ai cessé, les deux décennies suivantes, de la photographier, comme pour chercher dans ses grands yeux d'ailleurs une réponse, une solution. À quoi? Je n’en savais strictement rien.

Jusqu’à ce qu'un de mes jours anxieux, elle me transmette un numéro de portable qui allait bouleverser ma vie.

J’ai soudain compris la singularité de sa beauté, l’origine de son magnétisme. Fanny est habitée. Plus encore que son visage d’ange blasé, ou son corps attrayant de jeune femme, c’est sa conscience, son acuité hors normes qui m’avaient attiré. Elle a contribué à m'ouvrir des champs immenses d’intelligence perceptive menant à une compréhension de la complexité du monde.

Fanny est un genre de chamane, de mambo des Carpates. Une sorcière positive. Je suis ravi de la compter parmi mes plus fidèles amies.

Paris, 1999

Dernière mise à jour : 24 mars 2021

Photo: Elisabeth Obadia


Il m’arrive de penser que nous autres, photographes aguerris, ne sommes rien que des affabulateurs, doublés de marionnettistes. Autrement dit, que nous consacrons nos existences à faire prendre des vessies pour des lanternes. Parfois, nous nous mettons en scène au cœur de fictions narcissiques qui simulent nos vies véritables. Le pire étant notre habileté à mimer l’authentique.

Pourtant, derrière les décors policés, le réel est souvent affligeant.

Confronté à l’industrie de l’image, au monde de l’art et la compétition féroce qui y règne, il m’est arrivé plus d’une fois de perdre le nord. Maux de dos, insomnies, addictions, prises d'antidépresseurs. Jusqu’à ce que mon corps me lâche…

Les shootings trop rapides et stressants, les destinations lointaines photographiées au pas de course, entre deux avions. Le conformisme, l’hypocrisie du « milieu », les tensions d'egos, la brutalité des rapports de pouvoir. Les plus ineptes conflits de goût, nourris par de constants changements d’air du temps. L’instabilité financière. Tout ceci peut largement suffire à dissoudre les idéaux. Même si demeure tenace la flamme de la passion qui nous a mené là, que faire d’autre que de s'accrocher, s'adapter, jusqu’à se compromettre ?

Et puis, les années passent et on progresse. On apprend à se connaître, à mieux aimer la vie, au point de s’émanciper du cirque mercantile.

Un beau matin, je me suis réveillé en me disant : « Mon p’tit vieux, respecte-toi, ne fais que ce en quoi tu crois, et advienne que pourra ! »


HR



Ibiza, 2001

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