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Vous pouvez considérer l’eau comme une substance chimique composée de molécules H2O, et lui prêter des propriétés purement physiques. C’est votre droit.

Ou vous pouvez, comme les animistes, la considérer comme un élément mystique, royaume d’entités bienveillantes ou hostiles. C’est une option.

J’ai toujours été fasciné par l’eau, qui tient une place de choix dans mon univers.

Si vous y plongez votre main, la forme de vos doigts se modifiera au gré des ondulations. Vous vous confronterez aux notions de surface et de profondeur, de réflexion, d’opacité, de transparence et de suggestion. Vous promènerez votre regard aux frontières du visible, en un lieu où vacillent les certitudes. Un espace où je me sens particulièrement bien.

Je suis de ceux qui ne doutent pas de la mémoire de l’eau, ni même de son intelligence émotionnelle. Ce qui équivaut, purement et simplement, à croire en la transcendance.

De là à déduire que notre façon de considérer l’eau reflète la qualité de notre regard, il n’y a qu’un pas. Un pas que je franchirai sans hésitation.

HR


Congo, 2004

Je me demande souvent en quoi les images me fascinent tant, et depuis si longtemps.

Après réflexion, il s’est avéré que leur valeur de preuve était au cœur de mon intérêt. Leur vraisemblance leur confère une puissance illusionniste indiscutable. Même quand on les sait fausses, on ne peut s’empêcher d'y croire. L’évolution technologique a finalement peu altéré la crédibilité de la photographie.

Il y a là une brèche dans laquelle la plupart des photographes se sont engouffrés.

Je me suis moi-même pris à ce jeu et, en laissant ma mémoire voguer, me suis mis à remplacer le souvenir de mes expériences par les photographies en témoignant. Progressivement, mes photos sont devenues ma vie.

Du moins en sont-elles une des principales sources d’inspiration. Faire en sorte que sa vie ressemble aux images que l'on crée, plutôt que l'inverse, peut sembler délirant. Il n’en est rien, je vous l'assure. Il s’agirait plutôt d’ambitionner de faire de sa vie une œuvre. Être conscient du récit que l’on diffuse, et de sa force de persuasion n’a rien de singulier. En revanche, lorsque ce récit revendique une énergie de transformation, aussi bien de soi-même que du monde, il devient plus qu’une accumulation de signes. Il fonctionne comme une magie. Mon œuvre, avec ses caractéristiques et variations, se présente comme un témoignage de l’existence que je crée. Elle reflète mes vœux les plus profonds, autant que mes valeurs. Son sens n’est donc pas à chercher dans l'esthétique des images, mais dans celle du vécu qu’elles décrivent. Esthétique dont le style ne saurait être figé, car elle est, comme la vie, en constante évolution.

HR

Paris, 2021

Copyright: Elisabeth Obadia


Qui est ce jeune homme figé dans l’œil complice d’une femme, une fin d’après-midi d’avril 1997 ? Quel est cet individu perché sur le toit d’une finca formenterenca ? Quelles pensées parcourent son esprit ? Quels espoirs le portent ? Le soleil cru des Baléares a bruni sa peau délavée par l’hiver parisien. Sa main droite s’amuse à lancer un caillou en l’air, avant de le récupérer au creux de sa paume. Pile ou face ? Qu’attend-t-il de la vie ? À bientôt 34 ans, il est un jeune loup affamé de conquêtes. Son regard est ouvert à 360 degrés. Conscient de sa singularité, il voit l’avenir en grand, quoiqu’une puissance phénoménale le tire vers le bas. Il fait bien moins que son âge, s’accorde mal à l’air du temps, et collectionne les complexités.

Est-ce bien ce personnage qui porte en lui les germes de mon devenir ? Est-ce bien moi sur cette photo ? Indiscutablement. J’y reconnais un de mes anciens visages. J’y discerne mon corps amoindri par une opération au ventre.

J’aimerais retourner sur ce toit, maintenant, pour y contempler le chemin parcouru.

HR

Formentera, 1997

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