J’imagine que je pourrais être aisément taxé d’artiste ambivalent.
Sur ce site, et plus largement dans mon travail, se décline un point de vue qui peut en effet sembler confus, contradictoire.
Mais à y regarder de près, il n’est est rien.
Mon positionnement est en réalité une simple affirmation. Il s’agit de ne pas faire semblant, ne pas se renier.
Toutes les sociétés humaines, où s’affrontent des idées antagonistes, sont le siège de conflits infinis. On s’y oppose et s’y déchire inévitablement. Cet ordre des choses a certainement sa raison d’être profonde.
Il a produit des évolutions et révolutions, parfois positives, et répond à la façon que nous – Homo sapiens - avons de construire nos identités.
En termes de genre, d’ethnie, de nationalité, de culture, de religion, d’idéologie, il s’agit de se définir pour exister au sein d’un environnement donné. D’adopter des modalités comportementales pré normées, et les défendre contre l’intrusion de contrevenants susceptibles de compromettre la cohésion du groupe auquel on appartient.
Par nature, nous fonctionnons en tribus, communautés, corporations, clans et castes.
Pour que tout cela tienne, il est indispensable que nous ayons parfaitement raison, et les autres entièrement tort.
Je n’ai pas choisi d’être artiste, mais j’ai été désigné comme tel précisément parce que je me situais dans une zone floue, difficile à cerner.
Issu d’un alliage social et culturel déroutant, parce que contradictoire, justement, j’ai dû, depuis l’enfance, faire avec les opposés, me tenir au milieu d’un champ de bataille d'idées permanent, sans pouvoir véritablement choisir mon camp.
Le propre des métissages, c’est qu’ils échappent aux classifications binaires, et résultent de rencontres que les intéressés.e.s ont grand intérêt à rendre fructueuses.
De plus en plus d’individus, victimes d’injonctions autoritaires à se positionner, finissent par développer des troubles de la personnalité.
C’est qu’ils ne peuvent tout simplement pas choisir un côté au dépend de l’autre. Ce qui équivaudrait à vivre un déchirement schizophrénique.
Dans ce cas, je ne vois qu’une seule solution : s’accepter dans toute son entièreté, et travailler à faire de sa complexité une richesse.
Il en découle évidemment le risque majeur d’être incompris, exclu, stigmatisé, voir menacé par tout groupe unifié autour d’un point de vue affirmé, figé.
C’est-à-dire une bonne majorité des êtres humains.
C’est pourtant un prix inévitable à payer pour affronter sa propre singularité.
Ma stratégie personnelle consiste à tout assumer. En me servant des divers éléments me constituant comme des blocs d’un édifice en construction, j’espère atteindre un niveau significatif de cohérence et d’accord avec moi-même.
Et ce, sans adopter quelque posture stratégique permettant de dissimuler mon jeu.
Ni radicalement noir, ni blanc, ni riche, ni tout à fait pauvre, ni totalement d’ici, ni réellement d’ailleurs, j’évolue dans un espace d’hybridation où se rejoignent celles et ceux qui revendiquent la même ouverture d’esprit.
A ne pas confondre, surtout, avec de la neutralité, ni de l’indifférence. Il s’agirait plutôt d’une forme d’éthique qui pourrait être qualifiée, non sans précautions, d’idéaliste.
Serait-il possible de créer une communauté capable d’en embrasser plusieurs ? Une tribu englobante, sans frontières stables ?
C’est en tout cas ce à quoi j’ose encore croire, à contre-courant de notre époque séparatiste.
Une utopie de trop ?
HR Octobre 2019
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